Mon catamaran sous propulsion électrique 2° Partie : L'autonomie

28-09-2014 00:00:00

Nous sommes désolais de vous avoir fait attendre pour ce deuxième article, mais l’étude a été beaucoup plus longue et complexe que prévue. Une quantité inattendue de paramètres ont du être pris en compte et certains rapports ont mis un certain temps à nous parvenir.

Nous avons développé dans l’étude rapportée dans le 1° article, les éléments nécessaires pour choisir les moteurs électriques qui doivent remplacer les moteurs thermiques actuellement en services.

Ces critères sont basés sur la continuité dans les performances que chacun d’entre nous attend de son bateau. Il est bien évident que si nous avons réussi à trouver le propulseur qui tournera à la même vitesse que l’ancien avec un couple qui vous permet d’entrainer vos hélices, tout peut s’arrêter là. Il restera à trouver le moyen de produire et de stocker l’énergie nécessaire au bon fonctionnement de l’ensemble.

Je pense qu’il serait bon d’optimiser l’ensemble.

Si le rendement d’un moteur électrique ? (eta) ; qui est calculé en divisant la puissance de sortie d’arbre (perte en chaleur et divers frottements) par la puissance consommée (P=U x I) ou de façon plus pratique, la puissance mécanique par la puissance électrique 1, est en général excellent, de l’ordre de 80% à 95%, à comparer à celui d’un moteur diésel qui a beaucoup de mal à atteindre 30%, il n’en reste pas moins que trouver et stocker de l’électricité reste un problème majeur. Il va falloir le résoudre si l’on veut continuer à considérer la propulsion électrique comme une alternative crédible.

Avant de partir à la rechercher de cette énergie, il serait bon de savoir combien il nous en faut pour que le bateau ne devienne pas un radeau, certes de luxe, quand Eole nous fait défaut depuis dix minutes. Ceci est même une façon de parler, car, en réalité, nous cherchons la solution pour disposer d’une quantité d’énergie suffisante pour que le ou les moteurs électriques nous rendent à peu-près les mêmes services qu’un diésel. Le tout à un devis financier à peu-près identique (cette contrainte sera étudié dans le 3° article)

L’Autonomie est, en fait, uniquement la consommation du moteur rapportée à la quantité d’énergie disponible

 Nous pouvons donc jouer sur deux tableaux, réduire la consommation et augmenté la quantité d’énergie disponible.

1° ETAPE REDUIRE LA CONSOMMATION

Pour réduire la consommation il est indispensable de savoir quel sont les paramètres qui sont préjudiciable au rendement.

Un moteur à courant continue à aimants permanents, quel que soit sa taille et sa puissance, la tension à ses bornes et la vitesse de sortie sont liées. Plus la tension sera élevée et plus la vitesse sera grande et inversement plus la vitesse sera grande plus il aura besoin d’ampérage. Le couple est lui aussi un facteur de consommation important

 Il nous faut commencer par adapter nos habitudes à la rareté de cette énergie

Nous avons tous appris à gérer notre eau douce pour vivre dans le confort sans la gaspiller car elle est limitée. Nous pouvons faire de même avec l’énergie électrique de propulsion en adaptant notre pilotage aux caractéristiques du moteur électrique, comme on peut le voir sur les courbes Par exemple

  • Utiliser les plages de couples maxi. Alors que votre diésel doit monter dans les tours pour déplacer la masse du voilier, l’électrique peu réaliser ce travail  à des vitesses de rotation très faibles.

  • Les phases d’accélérations doivent se faire avec une progression lente dans les tours contrairement au diésel.

  • Dès que le bateau a atteint sa vitesse, arrêter un des moteurs (comme pour le diésel)

Ensuite il est peut-être  nécessaire d’adapter les périphériques immédiats aux avantages de ce moteur. Eviter les déperditions par effet joules en ventilant correctement le compartiment moteur. Même si nous n’avons plus besoin de tout le système de refroidissement et d’échappement (pompe à eau, échangeur, pompe primaire, échappement avec sont système eau/ gaz), l’absence de bruit nous permet de réaliser une aération conséquente qui amélioreras le rendement.

L’effet joule se fait sentir, pour une grande proportion, dans le dimensionnement des câbles de transport de l’électricité. Il faudra certainement veiller à les sur dimensionner selon le tableau ci-joint.

 

La simple logique nous dit que l’hélice d’un bateau ne s’intéresse au moteur qui l’entraine que s’il ne lui permet pas de tourner à la vitesse requise ou que si le couple n’est pas suffisant pour éviter qu’elle bloque à chaque accélération. En dehors de cela, que ce soit une turbine à réaction ou un pédalier avec plusieurs cyclistes pour fournir l’énergie, les performances seront strictement les mêmes.

D’un autre coté les performances de l’hélice ne sont données que par le pas multiplié par le  nombre de tour et diminué du glissement. Ce glissement est directement lié à votre vitesse de carène, que le responsable de cette vitesse soit l’architecte ou les soins d’entretien que vous accordez à votre bateau.

Dans notre étude précédente, nous avons constaté que le couple d’un moteur électrique adapté à votre voilier est très largement supérieur à celui de votre ancien diésel (une étude de Fisher Panda donne des résultats stupéfiants à cet égard) 2.

Le couple de l’électrique permettra d’atteindre la même vitesse de surface pour une vitesse de rotation divisée par deux en doublant le pas de votre nouvelle hélice ou en adoptant un réducteur en sortie d’arbre primaire qui double cette vitesse. Que ce soit l’une ou l’autre des solutions (un choix financier les départagera) vous aurait un moteur électrique consommant en théorie la moitié de l’énergie de base. En pratique, si on se réfère au résultat d’un test réalisé sur un catamaran de 47’, l’Alibi 47, les économies sont nettement supérieures à celles données par la théorie. Le graphique qui a été établi pour résumer ces données nous montre une économie de l’ordre de 85%.

Une fois tous ces conseils mis en application et quel que soit les gains qui ont été engrangés, il faut avoir l’énergie suffisante pour ne pas rester en rade trop rapidement.

2°ETAPE, EMPORTER OU APPORTER LA QUANTITE D’ENERGIE NECESSAIRE

a)-     Soit par la grandeur du réservoir (les batteries en langage électrique)

b)-     En optimisant la production de l’énergie.

 

a)-Soit par la grandeur du réservoir (les batteries en langage électrique)

Les batteries sont l’élément de base qui vient à l’esprit quand on parle de moteur électrique.

Les batteries ont quelques défauts historiques qui leurs donnent une très mauvaise image. Le poids en est certainement le premier, associé au fait que pour 100 ah stocker, seul 35 ah, au grand maximum, sont réellement disponibles dans les batteries classiques. La fragilité et le coût arrive juste derrière. Si vous en connaissez d’autres n’hésitez pas à charger le charriot des inconvénients. Pour le coût, on décortiquera le problème dans le 3° article.

Mais revenons au poids et pour continuer dans la recherche d’une vraie comparaison nous allons évaluer le poids de notre système de propulsion actuel avec ses Volvo.

Poids du Sail-drive 32 Kg, de l’inverseur 31 kg, du système de refroidissement (hors moteur) avec son liquide 22 kg, de l’alternateur et environnement 12 kg, du lubrifiant et filtres 12,4 kg et enfin poids du moteur à sec 225 kg (http://www.voiles-aventures.com/shop/details/148/manuel-d-atelier-volvo-md1b-md2b-md3b). Cela nous fait un poids global de 334,4 kg  multiplié par deux (pour un catamaran) pour la propulsion hors carburant soit 668,8 kg.

Le carburant embarqué, 400 litres dans mon cas, est à rapporter à la consommation pour affiner le poids. Je vais utiliser la courbe constructeur à pleine charge avec sail-drive et hélice livrés par Volvo, même si je n’ai pas des chiffres similaires en tête et que ceux-ci me paraissent excessifs. Venant du constructeur c’est assez déroutant pour que je mette plutôt ma mémoire en doute.

On constate que par heure de fonctionnement à 8 nœuds, soit à 2000 tr/mn, chaque moteur consomme 6 litres et donc 12 litres pour le bateau. C’est bien sur une approximation, mais en raisonnant avec les mêmes critères pour les moteurs électrique ont doit pouvoir nous approcher d’une comparaison de poids plutôt réaliste pour chaque heure de navigation.

Autonomie de mon catamaran serait donc d’environ 33 heures ou 264 Mn à la vitesse de croisière choisie (8 nœuds). Je cherche donc au moins une trentaine d’heures d’autonomie pour mon potentiel nouveau système de propulsion.

Le poids de l’ensemble propulsif Oceanvolt adapté à mon catamaran est de deux fois 46.5 kg (moteur, saildrive etc…) soit 93 kg. Le gain est, pour ce seul poste, tout à fait spectaculaire, on affiche 575,8 kg de moins sur la balance. Le défaut poids des batteries sera-t-il compensé par cette surcharge constatée.

Il faut d’abord savoir l’énergie qu’il faudra embarquer ou produire pour faire un vrai comparatif, sachant que si la solution est le tout électrique il faudra rajouter environ 500 kg aux 575,8 déjà constatés. Les 400 litres de gasoil le poids du réservoir, des tuyauteries, des filtres, décanteurs etc… n’auront aucune utilité. Pour ma part je doute, à priori, de la faisabilité d’un système tout batteries.

Nous allons faire un petit accroc à l’organisation des articles en comparant les poids en fonction du prix actuel des batteries. Les courbes et tableaux ci-dessus fait avec des batteries fournies par Océanvolt nous donnent une bonne approche du problème en nous montrant qu’à poids égal le tout électrique (batteries) n’a aucune chance de rivaliser avec le diésel, sans que nous puissions prendre en compte le coût, Océan volt ne nous ayant pas donné de vraies informations sur ce poste.

Nous allons reprendre les données avec des batteries de camion standards (le prix minimum possible)

Les batteries choisies sont des « Fulsar » 210 Ah pour 24 volts et d’un poids de 63 Kg. Ce genre d’accumulateur nous restitue environ 70 Ah en 24 v  pour 210 €. Pour alimenter notre moteur Oceanvolt avec environ 1 tonnes de batteries les résultats seraient vraiment catastrophiques. Tout juste 11 milles à parcourir avant la fin des hostilités.

Avec des batteries 2 volts « Victron energy «  de 910  amp, l’autonomie, pour un prix d’achat nettement supérieur et un poids lui aussi supérieur, nous autorise à parcourir presque 20 milles nautiques à 8 nœuds.

Enfin avec des batteries lithium-ion de chez « Clayton power » les résultats devraient être nettement meilleurs mais le prix de 881,83€ pour 150 ampères (130 ampères disponible) en 12 volts, même avec seulement 15,3 kg l’unité, limitera certainement d’une autre manière l’autonomie. Nous récupérons d’ailleurs, avec cette prestation, les caractéristiques des accus fournis par Oceanvolt, soit 70 Milles nautiques.

Quel que soit le modèle de batterie choisi, le tout électrique reste un mirage encore inatteignable si l’on veut conserver les caractéristiques du diésel c’est-à-dire une longue traversée sans un souffle de vent.

Il faut reconnaitre que cette hypothèse est un cas très rare, même si tous les navigateurs au long cours l’ont forcément parfois rencontré. D’autre part si l’on descend à 5 nœuds la distance parcourue passe à 287 Mn soit une distance supérieure à mon autonomie diésel. Cette distance est bien sur parcourue en près de 53 heures au lieu des 33 heures initiales pour la même distance.

Est-ce vraiment très important quand on voyage pour le plaisir? Je vous laisse choisir la réponse.

 De toute façon il faudra bien recharger notre parc batteries et le prix d’une telle quantité d’accus risque d’être tout simplement hors de proportion à l’heure d’aujourd’hui.

Dans 2 à 5 ans, avec le développement du transport électrique qui prend enfin une ampleur intéressante, nous pouvons espérer que le prix de l’ampère stocker baisse dans des proportions de 3 à 4 fois.

D’ici la exit le tout électrique, Nous allons envisager les systèmes mixtes

L’électricité devient certainement plus pertinente si l’on envisage de la fabriquer en cour de voyage pour maintenir les accus dans un état de charge qui va multiplier « presque sans fin » l’autonomie du bateau.

 

b)-En optimisant la production de l’énergie.

Pour cela il existe plusieurs outils allant du plus évident au plus inattendu ; groupe électrogène diésel ou à gaz, capteur solaire photovoltaïque ou thermique, éolienne horizontale ou verticale, hydrolienne, groupe Striling et même « turbolienne » (mât de la calypso 2)

Le groupe électrogène est le système le plus courant pour fabriquer de l’électricité, mais il semble anachronique d’utiliser un moteur diésel pour fabriquer de l’électricité sensée fournir l’énergie nécessaire à un moteur électrique voulant remplacer un propulseur thermique fonctionnant au diésel. Dit comme cela, la réponse est « cherchez l’erreur ».

Pourtant en décortiquant le chemin énergétique cela n’est pas totalement absurde. Tout d’abord le groupe, s’il est associé à d’autre producteur d’énergie, ne produit pas en continu. D’autre part un groupe fonctionne à une vitesse constante laquelle est optimisé permettant une consommation bien plus maitrisée. Ainsi à puissance égale un groupe électrogène 1500tr/mn qui produirait de l’électricité pour la propulsion consommerait à peu la moitié du gasoil que consommerait un propulseur diésel.

Détaillons cette affirmation.

La consommation d’un groupe électrogène itcPower 15 kVA moteur diesel 1500T/mn DHY14KSE est de 3,1 litres/ heures il en faut deux dans notre exemple, soit 6,2 litre/heures pour produire 80 % des besoins pour la propulsion

Nous avons vu que nos moteurs diésel consommaient 12 litres à l’heure pour la même utilité. Si nous trouvons les 20% qui manquent sans utiliser le carburant fossile, nous aurons une situation tout à fait inattendue en cela que notre réservoir de carburant de 400 litre nous apporterait une autonomie de 516 Mn à comparer aux 264 Mn actuel.

Comment trouver ces fameux 20 % manquant ?  Dans les batteries bien évidemment, si l’on dispose des outils pour les recharger hors les chargeurs issus de l’énergie fossile.

Les moteurs oceanvolt, comme presque tous aujourd’hui, sont des moteurs générateurs qui produisent de l’électricité quand il n’en consomme pas, pour peu qu’ils soient soumis à un courant de 4 ou 5 nœuds que le vent impulse au voilier. Voilà une bonne partie de notre besoin trouvé sans aucune modification ou installation nouvelle. Nous partons tout de même du principe qu’il est vraiment très trés rare et même impossible de naviguer plus de 500 Mn sans rencontrer un souffle de vent.

Les panneaux solaires feront sans problèmes, s’ils sont bien dimensionnés la jonction énergétique nécessaire.

Il semble donc que la solution magique soit celle proposé par la petite société Alibi avec ses catamarans d’un montage mixte diésel électrique (groupe électrogène séparé) avec un appoint capteur solaire ou éolienne pour ceux que le bruit engendre par ses petits générateurs, ne gêne pas.

Plan du bateau

A cette étape de l’étude et sous réserve du résultat de la partie financière, la propulsion électrique semble techniquement tout à fait réaliste. Des moteurs/ générateurs de dernière génération, des groupes électrogènes diésel 1500 tr/mn, des batteries lithium-ion à décharges profondes, un parc de capteurs solaires bien dimensionné et l’autonomie, avec nos 400 litres de gasoil d’origine, devrait permettre de parcourir jusqu’à 3 fois la distance qu’autorise notre propulsion tout diésel actuellement en service.

Nous allons très vite mettre en ligne le résultat financier de ce changement de mode de propulsion.

PG

 

 

1  La puissance mécanique correspond au couple du moteur en Nm, multiplié par sa vitesse angulaire en radian par seconde (rad/s)

2« Avec une propulsion électrique, une puissance de refoulement de 2,0 kW / 1 t suffit pour atteindre 95% de la vitesse de coque dans une gamme de régimes plus basse, on dispose d’une poussée plus que suffisante pour manœuvrer à plein et de manière fiable.

Dans la pratique, le surdimensionnement des moteurs de navires, la vitesse de coque en navigation sous moteur est à peine exploitée. A cette vitesse tout frémit et trépide sur le bateau, tandis qu’à 90% de cette vitesse la marche est douce et aisée. En général, on n’accepte sans plus une consommation de carburant supplémentaire de 50 % pour réaliser un gain de vitesse de 0,8 nœuds (du fait que la recherche d’un poste de ravitaillement coûte ensuite plus de temps que l’on ne peut en gagner).

Pour un yacht de 15 m, comme, par exemple, le Bavaria 49 (poids: 13,0 t), la vitesse de coque est de 8,76 nœuds. Ceci exigerait une puissance de 32,5 kW sur l’arbre (2,5 kW 1 t). Avec  le taux de 2 kW / 1 t recommandé, on atteint 95 %, soit 8,3 nœuds. Si l’on se contente de 8 nœuds (91,3%), la puissance nécessaire n’est même que de 17,7 kW, et pour 6,13 nœuds, une puissance de propulsion de 5,77 kW suffit (!!!!). »

http://lemaitreabord.canalblog.com/archives/2011/11/16/23604849.html

« Alibi 54, un catamaran de 16 mètres : innovation et design ! C'est un article détaillé d'Alexandre de Roquefeuill - à lire par ceux qui cherchent une bonne raison de naviguer sur deux coques !
Je me suis entretenu l'année dernière avec le chantier qui m'a impressionné par la qualité des solutions adoptées, la propulsion électrique n'étant pas la moindre... »

 

 



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